samedi 8 septembre 2012

Sous le noisetier


D’abord j’entends : le bruissement des feuilles des arbres, le clac de la chaise longue qui se referme, le bruit que font les semelles des tongs à chaque pas, les cris des enfants à l’approche de la vague, les verres qui s’entrechoquent, le sons des embrassades, les rires de joie des retrouvailles.
Et puis je vois : les sourires des êtres aimé-e-s, mes yeux humides de les quitter, les couvertures des livres qui m’ont accompagnés, la plage, étendue infinie devant moi, des vignes à perte de vue, des pierres, des ruelles,  des marchés.
Enfin je sens : le parfum des roses, l’odeur des tartes qui sortent du four, son parfum de brioche en toutes saisons. Je sens aussi que c’est la fin d’un temps de bonheurs et le début de la reconstruction. Je sens aussi qu’il va falloir bientôt tourner une page.
Alors je goûte : le sel de la vie et sur sa peau, les crêpes au sucre, le vin de Bordeaux, les tartes qui sortent du four par magie, des « gâteaux morts » en pâte à modeler.
Quand je serai grande, je déciderai que je ne serai plus nostalgique, que la mélancolie c’est nul et que ça ne fait pas avancer.
Et alors, de nouveau j’avancerai droite dans mes bottes et la tête au vent. En attendant, septembre est arrivé. Avec lui, des cohortes de tâches dont l’urgence pourrait me paralyser. Alors il me plaît de continuer à baguenauder dans mes songes d’été. Il me plait de penser que l’été va continuer, que je porterai mes sandales encore longtemps, que mes lunettes de soleil continueront à trône sur mon crâne.
On verra après.

samedi 1 septembre 2012

exercice de blog : la rentrée en 277 mots


-          C’est quoi un classeur format A5 ?
-          Ben A5 c’est un demi-A4
-          Donc c’est un classeur petit format …. J’vous jure….
-          Un bic 4 couleurs t’as dit ? Non 4 bics de 1 couleur
-          T’as le justificatif de domicile ?
-          J’ai acheté des pochettes de couleur différentes, ce sera plus facile pour s’y retrouver
-           
-          T’as vu le cours de Yoga il est à 20H30, donc je sors du bureau, je fais les courses, je fais manger les enfants, tu arrives et je peux y aller.
-          Tu as oublié un élément dans ton plan Wonderwoman
-          Non, non, regardes : boulot/courses/dîner/tu arrives/je pars
-          Ouais, et les enfants tu vas les chercher quand ?
-          Ah ben …… je ne peux pas. Ça colle pas
-          Donc, on ne change rien : je vais chercher les enfants, je les fais dîner et tu rentres après ton cours

-          Toutes ces nouvelles recettes sur fiches, c’est génial, on va manger équilibré !
-          Tu veux des feutres point 0.5 ou 0.7 ?
-          Le justificatif de domicile, j’ai. Le quotient familial, j’ai. La police d’assurances, j’ai. Les photos, j’ai. Les pages de carnet de santé, j’ai. Ah ben non, j’ai pas fait les photocopies.

-          On résume : le lundi y a Danse pour la grande, le mardi t’as squash, le mercredi y a solfège-piano- sports pour les enfants, le jeudi je vais nager, le vendredi j’ai mes réunions. Voilà, c’est casé !! Ah ! c’est sympa cette vie spontanée qu’on se fait !

-          T’as pensé aux assurances ?
-          C’est décidé, à la rentrée je vais nager !


jeudi 30 août 2012

Dormir.... ou pas


Je prends le côté gauche, t’es d’accord ?
Tu as mis le réveil ?
Tu éteins ?
Oui, j’ai déjà essayé l’homéopathie
T’as pas une loupiote ?
Il est un peu dur le matelas non ?
Tu me rends la couette ?
J’avais oublié de rebrancher le réveil.
Je lis un peu avant d’éteindre.
On devrait investir dans des lits à télécommande tu ne crois pas ?
Je crois que ta fille t’appelle. Si, si je t’assure, au milieu de la nuit, c’est forcément pour toi.
Est-ce que j’ai bien fermé la porte à clef ?
On a changé d’heure, tu fais gaffe hein ?
Pourquoi elle n’a pas choisi triangle la voisine comme instrument de musique ? Le violon à 23h, c’est dur quand même.
Les enfants ! Au lit ! J’ai dit Au lit ! Non pas de troisième histoire. Bon d’accord une petite encore.
Oh non ! Plus que 3 heures avant que le réveil ne sonne !
Tu sais quoi, j’avais bien fermé la porte à clef .
Oui, j’ai déjà essayé l’homéopathie pour dormir.
Nannnnn, tu ne vas pas porter ça pour dormir ? Si ? Vraiment ? Ah bon ? Non rien.
C’est décidé, je compte jusqu’à 5, si ce bébé ne s’endort pas, j’appelle la DDASS !
Tu as vraiment besoin de dormir avec ton téléphone à côté de toi ?
Oui, j’ai déjà essayé les tisanes pour dormir.
J’éteins dans 5 minutes. Oui.
Mais pourquoi cet-te enfant ne veut-il/elle pas dormir?
Oui, j’ai déjà essayé les fleurs de Bach.
Tu me lis encore une histoire ?
J’ai dormi comme un bébé ! Oh ma pauvre !
Tu dors ?


jeudi 23 août 2012

fluctuat nec mergitur

Dans la série, sois beau et utile, continuons notre origamesque parcours avec la construction de la barque. Celle-ci peut-être utilisée comme accessoire de bureau, [ et hop les crayons dedans], de cuisine ,[parfait pour les frites et les apéro dinatoires]. Modèle classique, il nécessite un tout petit peu de rigueur dans les plis pour que la dernière étape ne soit pas du grand n'importe quoi. [Genre je déplie tout, je fais une boule et je jette].

Pour savoir comment aller de là :

à là :

Je vous invite à me lire

Etape 1 : 
Partez d'un carré, côté coloré au-dessus et pliez-le en deux , de bas en haut :
Etape 2 :
Pliez en deux, de droite à gauche:
Etape 3:
Pliez trois des quatre épaisseurs du coin droit supérieur gauche sur le coin inférieur droit [fastoche, hein, même pas besoin de relire !].
Etpae 4:
Retournez le pliage en diagonale et hop le coin inférieur gauche passe en haut à droite [ non, on ne craque pas, on s'essuie les mains et on fait comme au-dessous]
Etape 5:
Marquez la diagonale d'un pli, [c'est à dire qu'on plie en diagonale, on passe l'ongle pour marquer le pli puis on ouvre de nouveau la feuille] et pliez les coins inférieurs droit et supérieur gauche sur le centre de la diagonale:
Etape 6:
Pliez en deux puis ouvrez doucement les côtés et voilà!




mardi 21 août 2012

Une des bases de l'origami : la coupelle

La coupelle est une sorte de figure imposée en origami. Elle est extrêmement simple à réaliser et très pratique.
A quoi ressemble une coupelle ? A ça : TADAH!


l'idée de l'origami c'est selon moi, une façon simple et élégante d'embellir le quotidien avec un carré de papier. En origami, tout démarre par un carré. [ça devrait CARREMENT plaire à ma cop's Sécotine, ça]. Donc voilà les étapes. Je vais tenter de faire un tuto genre "pour les dauphins" histoire d'être explicite car souvent les livres d'origami le sont peu et on s'y perd entre les " plis montagnes", les "plis vallées"et les "marquer le pli".[ oui, je crâne].

Etape 1:
Etape 1: marquer le pli
Placer le carré devant soi, pointe en haut et le plier la pointe du haut collée vers la pointe du bas. Marquer le pli : c'est-à-dire passer un coup d'ongle, [ou de moignon selon le/la propriétaire de la main], et ouvrir le triangle.

Etape 2:
Refermer et poser le triangle devant soi pointe vers le haut. La pointe en bas à gauche va aller toucher le milieu de la diagonale opposée [ on relit la phrase 3 fois, on respire, on prend ses cachets et on regarde la photo]
Etape 2: de gauche à droite


Etape 3: retourner et renouveler l'opération

Etape 4:
Replier la pointe du haut vers le bas. Marquer le pli. Retourner la coupelle de gauche à droite et faire de même avec la deuxième pointe.
Etape 4 : les bords
Voilà, la coupelle est terminée: il suffit d'écarter les bords de façon à créer un espace qui pourra recevoir trombones, bonbecs ......

On pourrait ajouter deux étapes au début, mais je trouve qu'elles sont inutiles et marquent trop le papier de plis. Or moins il y a de plis, plus c'est joli.






vendredi 17 août 2012

Repas d'été



Ils arrivent quand ?
On prend les assiettes de grand - maman ?
Les enfants, évitez de jouer dans la cuisine !
Comment ça tu as oublié l’eau gazeuse, et on fait comment pour la sangria ?
On prend l’apéro dedans ou dehors ?
On est combien à table ?
Mais tu es encore en pyjama ?
Ah non ! Pas de serviettes en papier ! Va voir dans l’armoire du fond, prends la nappe qui va avec !
Y a plus d’eau chaude !
Mais non il ne va pas pleuvoir, tu dis n’importe quoi.
T’as prévenu les voisins ? On peut se garer chez eux ?
Dire que ça fait 10 ans, c’est dingue non ?
Je prends la salle de bains !
Elle est superbe ta table !
Vas demander à maman son sécateur pour les roses, on va lui faire une jolie table.
Tu connais les Valbac, ils sont toujours en retard.
Tu essuieras les verres avant de dresser la table, dans ces grandes armoires, la poussière s’accumule.
Il y aura assez à manger tu crois ?
Qui vient avec moi chercher du pain ?
Après le 15 août le temps change, on mange dedans non ?
Tu leur as dit quelle heure ?
On ne se dispute pas, on échange !
Mais tu es encore en pyjama ?
Ça fait combien d’années qu’on fait ce repas ?
Avec nous ça fait douze adultes et 8 enfants.
J’ai reçu une goutte d’eau… si, si.
Ah, non, vous ne parlerez pas de politique hein ? Pour une fois, j’aimerais bien un repas d’été sans disputes !
J’aime bien ces retrouvailles, pas toi ?







mercredi 15 août 2012

La tarte aux mirabelles




-          «  Mamie, tu peux faire une tarte ? »
Mamie fait des tartes à tout. Les meilleures du monde. Elle a renoncé à faire elle-même la pâte depuis quelques années, ce que les enfants regrettent mais Mamie dit que c’est pareil.  
Chacun-e est allé-e chercher des paniers et des cagettes dans le grenier et les ont posé-e-s au pied de l’arbre. Agenouillé-e-s, accroupi-e-s, les enfants ont ramassé les mirabelles qui les attendaient dans le jardin. Les mûres, les trop, les pas assez, les parfaitement rondes, les cognées, les abimées, les picorées. Toutes dans les paniers.
Grand-père se tient loin d’eux, dans le jardin, droit comme un I. Il a fini de tailler ses rosiers, et fume une cigarette en les observant. Il vient vers eux et sans rien dire transporte les paniers pleins dans le préau. Il va voir Mamie :
-          «  Dis, c’est toi qui a demandé aux enfants de ramasser les fruits ? »
-          «  Oui, enfin, non, ils voudraient une tarte, autant en profiter non ? Tu voudras bien me les trier et les couper ? Tu sais, avec mes mains, c’est pas facile »
Grand-père acquiesce en souriant et s’en va finir de fumer.
Une bâche a été étendue sous l’arbre. Un grand a calé l’échelle contre le prunier car les petites voulaient atteindre le sommet. Elles sont montées sur l’échelle et ont secoué les branches pendant que Grand-père ne regardait pas. Les fruits sont maintenant tous ramassés. Plus tard, Grand-père va peser la récolte, juste pour s’amuser et quelqu’un-e  proposera, en souriant,  de la vendre au marché. Mamie coupera les prunes en deux et les déposera sur la pâte. Elle ajoutera un mélange dont elle a le secret et servira la tarte à la température parfaite : ni trop chaude, ni trop froide. L’un-e ou l’autre se souciera, à retardement, de savoir comment faire pour que la pâte ne soit pas amollie par le jus des fruits. On apportera le sucre, parce que les mirabelles c’est « astringent ».   Ensuite, on entendra : « mmm, elle est bonne ta tarte Mamie. »

Vents et marées


T’as mis de la crème ?
T'as vu, j'ai la marque du maillot!
Les garçons ! Faites attention avec vos planches !
Elle est bonne ?
T’as pris les jouets de sable ?
Waouh, il est chaud le soleil aujourd’hui !
Tu crois qu’il y a des crabes ?
J’peux aller me baigner ?
On est bien, hein ?
Et les coquillages, on les rapporte à la maison et on les mettra dans un bocal !
Avec moins de vent ce serait bien, non ?
Et les méduses, ça pique ?
Et ton capital soleil, tu y penses ?
Cette année, on a loué près du village et vous ?
Mouilles ta nuque et tes bras avant de plonger !
Vous êtes garé-e-s loin ?
Mets ton chapeau !
Je vais marcher au bord de mer, l’eau c’est bon pour la circulation.
Ne cours pas entre les serviettes ! Tu vas mettre du sable sur les gens !
J’ai bu la tasse !
Il n’a pas plu ? Ah si, moi ça m’a plu !
Ne me dis pas que tu utilises de la graisse à traire, c’est dépassé depuis les années 70 !
Qui a pris le parasol ?
Viens ! Elle est bonne !
Il a marché sur mon château de sable !
Ça pique les yeux la mer !
On pourrait louer pour l’année prochaine, non ?
Où sont les enfants ?
Finalement, la mer c’est mieux que la piscine, non ?
Tu es salé-e !
J’ai trouvé un coquillage rayé !
J’crois que j’ai pris un coup de soleil !
Le sable il brûle les pieds, mais c’est bien quand même.






dimanche 29 juillet 2012

hop hop hop le carnet idéal prend forme !

Hier soir, au son de l'album de Luc Arbogast, [chant contre ténor] , j' ai fabriqué ce carnet :
Zoli, Zèc, Zoli carnet que voilà !!!

En partant ce celui -là:
Mais que tu es laid, toi, allez hop faisons du beau !!!

Je suis ab-so-lu-ment ravie de cette transformation car il mélange origami, cartonnage et masking tape  soit ce que je préfère en bricolage. Je suis pas à l'aise avec des ciseaux : dès qu'il s'agit de couper droit, ça me stresse. Avec l'origami, pas de danger, une fois le carré de base découpé, il ne s'agit que de "pliés-montagnes" et "pliés-vallées" [Zeclasse en fait]. L'origami j'ai découvert toute petite, sauf qu'on appelait ça des pliages. 

- "fais moi un bateau"
- "non, une cocotte" ....et c'est resté.[l'année dernière, mes parents s'amusaient à table à leurs petits-enfants à faire des cocottes...]
Il y a 5 ou 6 ans, j'ai initié ma fille aînée et me suis améliorée car elle est d'une exigence absolue sur les pliés/marquage et fabrique de magnifiques pièces.
Quant au Masking Tape que je suis tombée dedans il y a quelques mois et je n'en décroche pas. C'est l'idéal pour les flemmard-e-s hyperacti-f-ves , ça se colle, décolle, repositionne, avec des assemblages de couleurs/motifs/largeurs/longueurs inimaginables. C'est ce que j'aime; je peux me servir de mes deux armes favorites:
- un cutter
- mon imagination
et après avec une bonne bande son, tout est possible.

Etape de départ:
j'ai récupéré lors de soldes de soldes de beaux papiers vraiment pas chers [1euro les lots d'une 100 aine de feuilles]. D'autre part, j'ai toujours un stock de liens de cuir, fleurs en tissus, boutons, épingles à nourrices, feutres etc etc que je chine toute l'année. Ce qui me coûte le plus cher ce sont les MT. 
bref, hier soir, ça a commencé comme cela:
j'avais, depuis très longtemps envie d'insérer dans mes carnets des petites poches , j'ai donc fabriqué des "coupelles", un modèle de base traditionnel en pliage. Au Japon, les enfants s'en servent pour mettre des bonbons, moi j'y mettrai aussi des bonbecs et des post-its je pense.
Découper un carré de 20X20 cm pour obtenir une coupelle de 12X8.5 cm

Moins on voit de traces de plis, plus c'est joli !
Etape 2: décorer les coupelles:
j'ai auparavant sélectionné les papiers de cartons sur lesquels elles seront fixées. Puis j'ai sélectionné les MT. Une des règles que je me fixe est de ne jamais dépasser les 3 couleurs, 2 motifs , 2 largeurs différent-e-s. [Oui, il y a des règles, ce n'est pas complètement à la one again !!]
4 onglets, donc 4 coupelles avec des papiers différents, décorées avec les MT
Etape 3: les séparateurs du carnet:
Encoller au pinceaux, lisser, appuyer, égaliser au cutter. Ajouter les onglets de marquage.



Etape 4: le lien

Pour celui-ci, j'ai utilisé un lien de cuir vert, attaché à une mini épingle à nourrice.


Et voilà, ma collec' s'aggrandit. Prochain projet : UN CAHIER !!


jeudi 26 juillet 2012

Féministes, et puis quoi encore? Soyons sérieu-x-ses

Liste non exhaustive de poncifs à qui j'aimerais tordre le cou. Mais comme les poncifs ne sont pas humains, je ne peux que les accumuler sur une liste que j'irai brûler après afin de les faire disparaître.
  
Commençons par les petites phrases qui finissent pas glisser comme ma main dans ta tronche les perles de rosée sur les plumes du cygne:


- on n'est plus dans les années 70' c'est un combat d'arrière-garde! [contraception pour tou-te-s, maintien des centres IVG, lutte contre les violences faites aux femmes], ouais avec 75000 viols par an, l'arrière-garde je la trouve devant moi!


- Franchement si on ne peut même plus rire ! Les féministes, hein, faudrait voir à vous laisser aller ( dans laisser aller, je comprends "baiser" mais ça c'est déjà fait) mouaaaaaaaaaaaaaaaah!![bon ça, je relève pas, parce que je comprends pas l'humour parce-que-je-suis-une-fille, ]


- olala, t'as pas assez à faire dans ta vie que de t'engager pour des causes perdues [ là, il y a tellement à relever qu'en général, je mets un moment à ramasser ma mâchoire fracassée sur le macadam avant de déconstruire tous les sous entendus présents dans cette petite phrase inepte] Durée : Une nuit si je suis de bonne humeur.


- Mais les féministes, en fait, allez, dis nous c'est toutes des homos, non? [et ben non!!].
- Mais les mecs féministes, ils sont féministes pour pécho des meufs , non ?[faudrait savoir, si elles sont tou-te-s homos, ça marche pas,hein?].
- chuis bête, moi.
- ben voilà, tu l'as dit (abruti!).


- ben moi les féministes, je les reconnais, elles sont toutes célibataires, et c'est pas en se comportant comme ça avec les mecs que ça va changer. On les reconnait facilement dans les supermarchés, elles sont seules, pas maquillées et ne portent pas de décolletés [lu sur un forum "au féminin]. Oui, je sais, ça surprend à la première lecture, à la seconde on écarquille les yeux, à la troisième on borborygme "hein, mais c'est débile! " et après on se marre.


- On pourrait peut-être choisir un film de filles pour ce soir, non? ça vous irait? [je pleure].


- Et ton mec il te laisse faire tout ça? [non, non, je l'attache avant de partir et les enfants le surveillent].


- Ta déco elle est chouette, mais tu devrais penser à adoucir avec des nuances plus féminines, tu vois ? 
- mmmm, genre pastel c'est ça?
- exactement, tu vois c'est pas si difficile!


- Les féministes, elles sont moches et mal baisées      [pitié, changez de registre, on n'en peut plus de celui-là].


- Et tes filles tu les élèves comment? [ demandes à leur père, moi j'ai manif, (pétasse)].


- Franchement, Zec, le Mademoiselle, entre nous, c'est quand mêmeu un peu tiré par les cheveux, non? [non].


- Les féministes, c'est un truc à la mode, ça va finir par se tasser [ DANS TES RÊVES!!!].


Ensuite, viennent celles/ceux qui aimeraient mais tu comprends.... moi c'est pas possible : résumé par Je ne suis pas féministe, mais....


- mais je trouve cela pas juste d'avoir dû arrêter mon travail pour garder mes enfants.
- mais je ne comprends pas pourquoi mon collègue gagne plus que moi.
mais j'aimerais faire comprendre à mon copain que quand j'ai pas envie de faire l'amour il doit l'entendre.
- mais je ne comprends pas pourquoi il a eu le poste et pas moi.
- mais je ne vois pas pourquoi on veut que je sois belle.
- mais je ne vois pas pourquoi on m'a demandé si j'avais un projet de bébé à mon entretien d'embauche.
- mais je ne sais pas quoi faire, je suis enceinte, c'est l'été et je veux pas du bébé.
- mais j'ai un peu de mal avec l'épilation intégrale mais mon mec il préfère, il dit que ça fait comme dans les films.


Enfin, parfois, dans la vie pour de vrai, il y a des situations plutôt chouettes:
OUAIS, je suis féministe
-moi aussi
- moi aussi
- moi aussi
- moi aussi


Voilà, juste un billet d'humeur tout simplement dû à cette vidéo là des Brigitte entre propos essentialistes, et frivolités qui à 2mn35 répondent à "êtes- vous féministes", qui m'a glacé. Mais c'est vrai aussi que le retour fashion du chapeau est tellement vital (pfff)
Et pour la chanson concernée , la reprise de Benz de Joey Starr, pour vous faire une idée c'est à droite sur le lecteur [ouais, l'accueil dans l'aquarium c'est la classe internationale]



mercredi 25 juillet 2012

Mais ma pauv ‘dame, à l’école, on leur apprend même plus à se moucher - Les patient-e-s Part 2




Us et coutumes des patient-e-s en orthophonie. Pour être juste j’aurais pu écrire de MES patient-e-s, mais non. Premièrement ce n’est pas sémantiquement correct, ce ne sont pas MES patient-e-s, ce sont des individus qui ont choisi le cabinet dans lequel j’exerce pour leur prise en charge en orthophonie. [Je viens d’entendre, un « de toute façon ils/elles n’avaient pas le choix ! Mais on reparlera des zones sous dotées une autre fois]. Ensuite,  je pense qu’ils/elles ont le choix. Le choix de ne pas venir, le choix d’aller plus loin etc etc.Et enfin, il me semble que des collègues vont penser que j’étais dans leur cabinet pour écrire ce billet
Ce que moi je dis :
Un jour ils ont franchi la porte de MON cabinet, [là je peux l’écrire, et toc !] et ont accepté le projet thérapeutique proposé AVEC les règles du cabinet. Enfin c’est ce que je crois toujours. Qu’ils, elles ont compris que c’est un PACK. Le packdeZec, ouais, à la limite du pacte. Un accord tacite qui aurait la valeur d’une poignée de main en termes d’engagement. De l’ordre du symbolique, qui sous-entend : « Vous me faites confiance pour vos soins, je vous fais confiance pour respecter les règles de ma planète ». Parce que la rencontre autour du bilan, cet entretien suivi de tests et de la proposition de projets, c’est la rencontre de nos planètes et moi sur ma planète y a des possibles, des milliards, des billions, des billions de milliards de possibles. Mais il y a un cadre. Assez large, mais ferme. Et en général, quand on touche les bords, ça pique. Fort. Et le cadre, je le pose. Immédiatement.

Mates le film coco, tu vas tout comprendre !


[FIN DE BILAN champ contrechamp] Zec à son bureau. Le gamin en face. Papa/Maman autour.
Zec sourit [c’est dans l’ADN , Zec sourit 80% du temps, 10% elle maugrée, 10% elle dort]
J’ouvre l’agenda, prête à utiliser le bulldozer pour pousser les murs pour trouver une place qui satisfasse tout le monde. [Je passe sur les «  jpeux pas j’ai judo, feux de l’amour, gym, courses, ma belle -mère à emmener, il fait la sieste, ça m’ennuie c’est un peu tôt/tard, il fait nuit en hiver à 16h00, je préférerais qu’il goûte à la maison, y a trop de monde chez vous dans la salle d’attente, vous ne travaillez pas le samedi ?, j’ai peur des microbes, y a macramé au centre, le matin on à kiné, ah, comme c’est dommage, on pourrait venir avec le fis de Lucienne qui est chez votre collègue - 19h aurait été parfait, mais vous ne travaillez pas, elle a soutien, il a cathé, on a foot? franchement ça m'arrange pas]. Voilà, ça c’est fait.
Et là, j’attaque avec les règles d’usage, mais pas toutes en même temps, hein, ça va venir au fur et à mesure. Cependant, j’insiste sur le fait que c’est un rendez vous régulier, et que si il y un empêchement il suffit de prévenir
Ouais, je sais, je suis trop prévisible………. Vous SAVEZ DEJA ce qui va se passer ….. ben si, vous savez  [la vach’ vous êtes trop fort-e-s], ben ouais ELLES ET ILS ME PLANTENT !!!!!!!!!!! ------ [ABATTEZ L’TROUPEAU ET PARTONS EN VACANCES !].

[Faudra couper au montage après « prévenir »]
Ce qu'ils disent:
Ok je me reprends, je ne pense pas que les lapins soient le pire, malgré de récurrentes et impérieuses envies de cuisiner un civet, le plus irrespectueux dans tout cela c’est le manque de considération des êtres humain-e-s envers les autres êtres humain-e-s. Souvent, les patient-e-s ne s’excusent pas, ils/elles n'appellent pas et reviennent la semaine d'après puisque:
- " vous l'avez dit MadameZEC, c'est toutes les semaines le rendez-vous !"
- "c'est vrai, ce qui signifie que vous auriez pu aussi venir mardi dernier"
- "on pouvait pas , on avait l'enterrement de la grand-mère"
- "oh ben c'est pas d'chance" [parce que la grand-mère il lui arrive de décéder plusieurs fois dans l'année, vrai de vrai]
 ------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
CE QUE JE DIS
Bon, donc, c'est entendu, vous me prévenez quand vous ne pouvez pas venir, vous avez aussi mon numéro de portable, vous pouvez l'utiliser.


CE QUE LES PATIENT-E-S FONT:
Le soir vers 22H30: "MadameZec? c'est les parents de A: il pourra pas venir demain, on voulait vous prévenir avant ". Ou encore texto "dsl je pe pa venir demin chez orto a pa voitur" (non signé, bien sûr)


--------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
CE QUE JE DIS
Vous pouvez attendre dans la salle d'attente s'il vous plait, je crois que votre enfant a besoin que vous soyez là au cas où...[enfant de 2 ans, 2.5 ans]
Oui, c'est ça 30 minutes
Non, je préférerais pas, pas aujourd'hui, mais après bien sûr vous pourrez aller faire les courses


CE QUE LES PATIENT-E-S FONT:
1H30 plus tard, ils/elles reviennent des courses et moi j'ai fait garderie
-------------------------------------------------------------------------------------------------------------------------
CE QUE JE DIS
Ce serait bien qu'il/elle apprenne à :
 -se moucher,
- vivre sans biberon
- vivre sans tétines
- se laver les mains


[cocher la case qui va bien]


CE QUE J'ENTENDS:
- "Oh: mais nous aussi on aimerait bien, mais à l'école, on leur apprend plus rien MadameZec."
*je pleure*


Alors voilà au gré des séances ce que moi et d'autres pouvons entendre. Parfois ça m'amuse, ça m'agace parfois encore ça me blesse. Mais ces patient-e-s et/ou parents de patient-e-s, je les accueille avec respect et professionnalisme et je travaille du mieux avec chacun-e d'entre eux/elles.
C'est juste la fin de l'année, et la fin de l'année, on a envie de se lâcher.
















mardi 24 juillet 2012

Comment ça, pas avant 6 mois? Vous vous moquez du monde? Les patient-e-s Part.1

On va commencer par poser le postulat de départ : j'adore mon métier, mes patient-e-s et mes conditions d'exercice.Vous vous demandez à quoi ça ressemble une "Madame Katoubon"? Ne cherchez plus :collez ma bobine et c'est fait. Madame Zec Katoubon.
Je précise car la suite est beaucoup moins aimable.
Dans mon exercice, j'ai deux fin d'années: décembre et Juin.
Et en juillet, il n'est pas rare que la moutarde me monte au nez. C'est à dire que toutes les petites tracasseries du quotidien d'orthophoniste, toutes les mesquineries prennent d'incroyables proportions.
[C'est là qu'interviennent dragons et drakkars]
Alors, comme chacun-e d'entre nous peut devenir patient-e à son tour,voici la liste non exhaustive des quelques us et coutumes des patient-e-s et les us et coutumes  d'une crasse évidence à respecter face à son/sa professionnel-le- de santé.
- La prise de rendez-vous:
il est possible que votre interlocuteur.trice ne réponde pas au téléphone le jour où vous vous décidez à prendre rendez-vous [vous avez la prescription dans votre sac et c'est "now or never"]. Plusieurs hypothèses à envisager avant de vous agacer : elle/il ne répond pas parce qu'elle/il est déjà avec un-e autre patient-e, mange, fait pipi voire caca, ou il/elle est tout simplement absent-e.
Il/Elle est absent-e mais cet-te abruti-e a oublié de le dire sur le message de son répondeur. Alors vous rappelez 5 fois sans laisser de message. Et ça c'est absolument génial pour quand la.le praticien-ne va rentrer à son bureau. Si, si on adore.
Mais cela ne vous empêche pas de vous agacer qu'il.elle ne vous ait pas rappelé-e-s au bout de 24H, ben oui, vous avez l'ordonnance depuis 6 mois, mais votre rendez-vous est urgent. OUI, on sait que c'est urgent, mais c'est pareil pour les 30 autres qui attendent. Alors, inutile de nous proposer de travailler plus, plus tôt, plus tard ou le dimanche. En tout cas, moi c'est pas la peine de me le proposer, hein. Je ne travaille que de 8H30 à 18H30, Monsieur. Ah, c'est pas assez tard? J'en suis désolée, mais je travaille aussi le midi... Ah , ce n'est pas possible pour vous? dommage. Non, non, pas le samedi, non, non vraiment pas. [Je suis une grosse FEIGNASSE]
-le jour du rendez-vous:
Vous avez rendez-vous? :Youpi!
Vous êtes à l'heure ? :Sensass !
Vous avez l'ordonnance? : Incrédibeul!
Vous avez un moyen de paiement? : Non 
[ah ben, 3 sur 4 c'est pas mal, hein] 
Vous dites que?? AH: vous êtes passé-e-s chez le coiffeur avant et donc vous n'avez plus d'espèces. (ben oui, je comprends). Vous ne pensiez pas qu'il faudrait payer ? [ben si, c'est mon métier en fait]. 
Variante: c'est mon mari qui a la carte vitale, je n'ai pas la monnaie etc etc...et évitez aussi de me proposer de garder la monnaie, j'ai pas de tirelire cochon sur mon bureau et en plus au dentiste vous ne le suggérez même pas.


- dans la salle d'attente:
PRINCIPE DE BASE: on ne salit pas volontairement la salle d'attente. Donc les bonbecs c'est dans la poubelle, et les crachats dans les toilettes. 
On évite de déchirer les livres et de casser les jouets. 
Peut-être vous demandiez-vous pourquoi il y a toujours des magazines pourris dans les salles d'attente? J'vous fais une confidence: LES BIENS ILS DISPARAISSENT [espérance de vie d'un magazine datant de moins d'un mois dans ma salle d'attente : 1 semaine]
REGLES ANNEXES: on ne vole pas le PQ ni l'aspirateur , ni le cale-porte. [merci].
Et aussi : on évite de rebrancher son téléphone portable dans la salle d'attente de la dame car oui, je sais, Madame, ça coûte cher l'électricité mais c'est l'jeu ma pauv' Lucette, c'est l'jeu. Mais oui, moi aussi je paie. Et en parlant de téléphone, vous pourriez cesser de converser pendant que je vous parle de votre enfant? non? vraiment pas?


Voilà, voilà les petites tracasseries du quotidien qui ne sont rien en comparaison des regards des patient-e-s qui s'éclairent quand ils/elles vont mieux. 
Mais parfois, ça agace.


J'vous laisse, j'ai mon dragon qui a faim.

lundi 23 juillet 2012

Dédé la boulange - La rue Broquet 2


Aristide serre Octave dans ses bras, essuie avec douceur les traces de meringue restées sur la joue d'Alia et leur souhaite une belle nuit. Il est 3H00 du matin, un 23 décembre et Aristide doit aller travailler. Il regarde une dernière fois cette belle assemblée       . Il leur sourit avec bienveillance. Ils ont tous des étoiles dans les yeux ce soir. Octave, sans un mot, raccompagne son ami à la grille. Aristide a l'air ailleurs, loin. Cela lui arrive parfois. Octave est un garçon discret. Il ne questionne pas, il écoute. Il voit bien qu'Aristide est préoccupé mais il ne demande rien.
Il tourne la clef dans la serrure, ouvre la porte dans un grincement.
Les deux amis se regardent. Aristide hésite :
–                    Ta serrure, l'ami, on la crochète en deux secondes, faudrait voir à la changer surtout si la dame reste.
–                    Tu t'y connais bien en serrures pour un pâtissier, Aristide.... répond l'autre amusé
Aristide soupire, regarde ses bouts de chaussures ;
–                    Salut l'ami, à bientôt.
La porte de referme derrière lui.
Il marche, d'un pas traînant, le cœur lourd tant il aimerait parfois se confier au jeune Octave. Il regagne son fournil.
Les habitants de la rue Broquet ont toujours connu le fournil. Mais peu savent les secrets qu'il abrite. Les témoins du passé ont déménagé, sont morts, et dans le quartier, nul de trahira Monsieur Aristide.
Pas par peur, non, mais par respect.
Aristide soulève la grille qui protège l'entrée de son univers. Il n'a pas de boutique.
Au rez de chaussée, on entre dans une salle circulaire dans laquelle sont installées des chaises toutes différentes. On l'appelle la « salle des pains perdus »
 C'est là qu'on attend les livraisons. C'est comme une religion d'aller chez Monsieur Aristide, les meilleures fougasses de toute la ville, ça se mérite !! La pièce est éclairée par des puits de lumières creusée dans le toit. Aux murs, des niches qui abritent des tasses, du thé, des journaux, des livres. Chacun se sert. On vient là pour se désaltérer, se réchauffer, se nourrir le corps, l'esprit et le cœur.
Passée cette pièce un escalier mène aux appartements d'Aristide en haut et au fournil en bas. Tout en pierre. Le domaine privé est constitué de 4 pièces à l'étage (une chambre, un bureau, une cuisine, une pièce à vivre), au dernier étage un grenier où Aristide a surélevé ses souvenirs. Il les garde tout en haut, pour qu'ils ne retombent pas dans l'oubli.
Quand Aristide se lève, au milieu de la nuit, il hésite toujours entre monter  soulever le passé et descendre nourrir le présent.
Dans son fournil, il a installé des haut s - parleurs de bonne qualité qui diffusent de l'opéra italien à longueur de temps. Les habitué-e-s connaissent l'humeur du chef de ces lieux en fonction de ce qui passe dans leurs oreilles : La Callas, le patron est mélancolique, Pavarotti le patron est gai....
Il y eu de mémorables prises de bec dans l'antre d'Aristide concernant les meilleurs prestations. Dans ces cas-là, les dates fusent :
–                    58 dit l’un,
–                     n'importe quoi,  62, rétorque l'autre,
–                     et vas donc, si t'as pas nettoyé les esgourdes ce matin, décambutes vite et va t'occuper de ça on en reparlera plus tard  !!
Aristide est de mauvaise foi. C'est un fait notable. Il est généreux mais de mauvaise foi. Il est soupe au lait aussi. Un jour, un apprenti, plus espiègle que les autres, a osé subtiliser un des disques et le remplacer par une de ces horribles musiques entre la musique classique et le cours d'éveil à la musique pour des petits. Tout le quartier se souvient de la colère   d'Aristide : le ciel est devenu noir, le visage du pâtissier congestionné, et le regard du jeune homme …. vide. Il était pas content Aristide, mais pas content du tout, du tout, du tout. Le jeune homme s'est vu refuser l'accès au fournil pendant 7 jours. 7 jours pendant lesquels il a dû aller à l'école de musique perfectionner son oreille. Il n’en menait pas large le gamin. Mais après cette semaine à entraîner son oreille, il demanda à Aristide de l'aider à connaître et reconnaître, puis apprit à lire les partitions. Des nuits et des nuits sans fermer l’œil. Et ce qui devait arriver arriva. Un matin, il se présente à l'atelier engourdi de sommeil, et il s’endort  pour de bon  la fournée de croissants fini cramée, brûlée, noircie. Tout honteux il se présenta devant Aristide qui savait mais ne disait rien, attendant que son apprenti vienne le trouver. Ce jour là, Aristide offrit ce qu'il avait à offrir : un avenir. Il permit au jeune homme d'étudier à loisir la musique s'il le faisait sérieusement. Il payerait ses études, il lui permettrait de revenir à la pâtisserie si...
Rien en échange, Aristide sait qu'on ne négocie pas avec le destin. Le jeune homme s'en est allé, il est devenu un concertiste de talents. Il envoie une carte à son patron de chaque ville où il joue et revient régulièrement rue Broquet.

Il est 3H00 du matin, Aristide entre dans son univers et monte au grenier. Il vit sur un mensonge et la nuit étoilée qu'il vient de passer le pousse à se libérer. A se libérer et libérer de leurs serments les ami-e-s du quartier. Il ne fera pas de cuissons cette nuit. Il va ouvrir les portes du passé et se construire un avenir. Il monte au grenier. Il y fait chaud. Il allume la lampe à pétrole que son père lui a donné. Il ouvre les malles, sort les photos du temps passé. Il parcourt les journaux, les avis aux peuple noircis par le temps. Il transporte les lourdes machines dans la salle des pains perdus, punaise les affiches, les photos en noir et blanc, les cartes, les tickets, la vieille radio et tous les morceaux de honte et de bravoure.

Le lendemain matin, y du monde dans la rue Broquet, des clameurs aussi. On dit que le fournil n'est que silence. Tou-te-s s'inquiètent et se massent devant la porte fermée. On jacasse, on extrapole. La rumeur est parvenue jusque chez Octave. Alors, avec Alia et les autres , ils se joignent au cortège des habitué-e-s. Peur, étonnement, ça se mélange. Monsieur Aristide, grave et silencieux, ouvre la porte et les invite à entrer.
Nul ne reconnaît la salle. Chacun-e s'assoit quasi religieusement. La salle est à craquer. Le dernier entré ferme la porte et Aristide prend la parole.
Et il raconte, l'arrivée rue Broquet avec sa famille, la guerre et la résistance.
–                    On m'appelait Dédé la boulange...avec mon copain Pierrot les dents blanches, on a fait les 400 coups ici et là. De petits escrocs, des larcins, pour survivre. J'ai jamais été pâtissier, mais après j'ai appris.  Avec Pierrot, on avait trouvé un moyen de faire tourner la planche à billets. C'était avant la peste brune. On s'était installé là, dans le fournil. On y planquait le matos. D'où mon surnom. Pierrot , lui, parcourait la ville la nuit, les cafés et les salles de jeux. Et puis, est arrivé l’horreur. Fallait se planquer, devenir prudents. On avait les machines, alors, on a proposé aux gars et aux filles des sections de fabriquer des faux papiers et des cartes de rationnement. Faux billets, faux papiers, c'était pareil. Et on l'a fait, longtemps, on s'marrait bien. On ne connaissait pas les noms des gars, on ne voulait pas. On ne savait pas si on s'rait assez forts, alors on voulait rien savoir. Juste on faisait tourner les machines et on livrait. On faisait du pain aussi, des croissants pour les minots de la rue : Esther , Sarah et tous les autres. Leurs mères passaient le matin, on glissait les cartes dans le pain noir. Leurs hommes passaient la nuit, on leur donnait les papiers. On planquait les armes dans la farine. Et un jour, ils ne sont plus venus. Ni les hommes, ni les femmes. On a attendu de revoir Esther et Sarah, mais elles ne sont jamais réapparues. Pierrot est parti, moi j'ai fait illusion. Ils m'ont arrêté et relâché. Je suis mort dans leurs cellules. Après je suis revenu, j'ai pris le nom d'Aristide, en mémoire du policier qui m'a aidé à m'évader.
Je n'en peux plus de garder cela pour moi. Après la nuit blanche que nous avons passé, je devais vous dire tout cela.

Aristide, regarde ses pieds, il est désemparé. Il voit une marée d'yeux écarquillés. Lequel de ses amis va le délivrer, l'absoudre ?
Octave se lève, lentement, et va le serrer dans ses bras sans un mot, le regarde et lui sourit. Et tou-te-s font de même. Et chacun étreint son voisin. La vie reprend ses droits. Les sourires sont larges, la vérité a éclaté, et l'amitié n'a pas bougé. Une immense vague de bonheur envahit la salle des pains perdus.
Mr Aristide écrase une larme, rentre dans son fournil et un peu plus tard, on entend un air d’opéra italien.